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Chroniques
Jules Massenet
La Terre Promise
Le 12 mai 2012, en vue de fêter le centenaire de la disparition de Jules Massenet (1842-1912), l’Église de la Trinité (Paris) accueillait un concert dédié au sacré dans l’œuvre de cet héritier de Gounod.
Regroupant quelques airs d’opéra, une première demi-heure permet d’entendre Salomé (« Charme des jours passés où j’entendais sa voix… ») et Jean (« Ne pouvant réprimer les élans de la foi… ») dans Hérodiade (1881), Frère Boniface énoncer La légende de la sauge tirée du Jongleur de Notre-Dame (1902), Thaïs seule tout d’abord (« O messager de Dieu ») puis en duo avec Athanaël (« Baigne d’eau mes mains et mes lèvres ») dans l’ouvrage qui porte son nom (1898), ainsi qu’une prière (« Ô Souverain, ô juge, ô père !... ») chantée par le rôle-titre du Cid (1885). D’emblée, Sabine Revault d’Allones attire l’attention, un soprano qui séduit par la souplesse et la conduite du chant, agrémentées d’une diction très soignée.
La soirée se poursuit avec une rareté : La Terre Promise, oratorio pour soli, chœur et orchestre donné pour la première fois à Paris depuis sa création à l’Église Saint-Eustache, le 15 mars 1900 – jour de la création française d’une cantate peu connue de Wagner, La cène des apôtres (Das Liebesmahl der Apostel, 1843). Quand il s’attelle à son écriture, d’avril 1897 à l’année suivante, le Français ne découvre pas le genre religieux puisqu’il a déjà fait connaître Marie-Magdeleine (drame sacré, 1873), Ève (mystère en trois partie, 1875) et La Vierge (légende sacrée, 1880).
Conçu en trois parties – Moab (L’Alliance), Jéricho (La Victoire) et Chanaan (La Terre Promise) –, l’oratorio dont Massenet signe le livret a la particularité de mettre en vedette trois tessitures pour incarner successivement La Voix céleste. Le baryton Jean-Louis Serre donne donc le signal de la mise en chemin (« Écoutez, Israël : vous passerez le Jourdain, pour vous rendre maître de ces nations plus nombreuses et plus puissantes que vous »), avant que le ténor Patrick Garayt explique comment mettre à terre les murailles de Jéricho. Enfin, le soprano célèbre le partage de la terre donnée en même temps que la paix.
Beaucoup d’artistes sont réunis pour cet hommage, et tout d'abord différentes chorales franco-allemandes formant le Chœur Français d’Oratorio (Oratorienchor Köln, Chœurs Elisabeth Brasseur, Ensemble Choral A Contretemps, Ensemble Polyphonique de Versailles et Chœurs de Cernay-la-Ville auxquels s’ajoutent quelques éléments de l’Ensemble Vocal d’Orgeval et du Nouvel Ensemble Polyphonique de Paris), lequel s’occupe de monter des œuvres à grands effectifs depuis 1986.
Quant à lui, l’Orchestre Français d’Oratorio a pour vocation première de servir la musique sacrée. Jean-Pierre Lo Ré, son fondateur en 1972, le dirige avec une tendresse recueillie – qui n’exclue pas une certaine sécheresse, lors de la Marche du septième jour ponctuée par Les Cuivres de Guy Touvron. Ces qualités ne sont malheureusement pas suffisantes pour donner un large plaisir à l’écoute d’une œuvre moralisante et plutôt faible. Nous conseillerons donc cette captation aux seuls amateurs du compositeur.
LB