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En écoutant le présent enregistrement d'œuvres pianistiques de Rossini, on est frappé et ému de savoir que le piano qui nous distille ces instants de pur bonheur appartint au compositeur lui-même. Il aurait, dit-on, participé à la création de la Petite Messe Solennelle.

Ce piano, dont l'authenticité ne semble faire aucun doute (lettre de Gioachino Rossini à Pleyel, datant du 2 août 1846), a fait l'objet d'une restauration extrêmement soignée. Il est particulièrement difficile d'en donner le détail : qu'il suffise de savoir que le feutre qui couvre les deux sous-feutres, en peau d'élan et de daim, a une densité de 0,38 gramme au millimètre cube… Les variations de matériel, en ce qui concerne les jeux de marteaux, apportent une sorte d'ingénuité et de candeur rêveuse qui constituent le registre anodin si caractéristique du style du Rossini pianistique.

On sait que les soirées hebdomadaires données par le couple Rossini étaient courues pas le Tout-Paris artistique de la Restauration et de la Monarchie de Juillet. Y allait-on pour la musique du maître ou pour la cuisine de la maîtresse de maison ? Toujours est-il qu'on y rencontrait toute l'Europe musicale : Verdi, Liszt, Meyerbeer, avec leurs interprètes. Lorsque les doigts du cygne de Pesaro devinrent trop gourds, il demanda au directeur du Conservatoire de lui envoyer un jeune pianiste de qualité. Ce fut Camille Saint-Saëns qui fit l'affaire. Et l'on peut imaginer une sorte de filiation qui, de Rossini à Saint-Saëns, aboutit à Erik Satie et débouche sur toute une musique surréaliste.

On s'en laisse facilement convaincre par les titres enregistrés sur ce disque : Impromptu tarantellisé, Prélude inoffensif, Mon prélude hygiénique du matin, sans compter cette subtilité érotique qui s'appelle Une caresse à ma Femme. C'est le pianiste Flavio Ponzi qui interprète les morceaux choisis de ce récital exceptionnel dont l'éclectisme est particulièrement séduisant.

CF