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Chroniques
Giacomo Carissimi
Arion Romanus
Au début du XVIIIe siècle, alors qu’il est inhumé depuis bientôt cinquante ans, certains parlent encore de Giacomo Carissimi (c.1605-1674) comme du plus important musicien du siècle précédent, si ce n’est le plus grand d’Italie. Paradoxalement, de même que sa date de naissance est incertaine, sa vie s’avère mal connue.
Fils d’un tonnelier, cadet d’une fratrie de sept enfants, le futur représentant de l’École Romaine devient orphelin avant l’adolescence. Dès lors, il semble avoir été recueilli par l’une des nombreuses institutions italiennes pour enfants pauvres auxquelles l’éducation musicale importait. Entre vingt et vingt-quatre ans, le jeune homme assume des fonctions successives : organiste à la cathédrale San Lorenzo de Tivoli, maître de chapelle à celle de San Ruffino d’Assise puis de l’église du Collegium Germanicum et Hungaricum de Rome (séminaire jésuite de langue allemande). Ordonné prêtre en 1637, il défend la musique religieuse (avec emploi original de la cantate dans ce domaine) [lire notre critique du CD] comme la profane (des pièces en hommage à Catherine de Suède). Il enseigne aussi à ses compatriotes (Bassani, Bononcini, Cesti, Colonna, Mocchi, etc.) comme aux étrangers de passage (Baudrexel, Charpentier, Kerll, Krieger, etc.).
Conteur de nombreuses « histoires sacrées » associées à l’Ancien Testament [lire notre critique du CD], Carissimi raconte ici celle d’Arion de Méthymne, tirée d’une Antiquité semi-légendaire. On connaît tous cet épisode de la vie du poète et musicien grec, né dans l’ile de Lesbos, au VIIe siècle avant J.-C. : jeté à la mer par des marins qui souhaitent se partager ses biens, le joueur de cithare et inventeur présumé du dithyrambe est secouru par un dauphin apollinien qui le ramène sur la côte.
Fondé sur des textes latins anonymes, publié avec le soutien du fidèle Giovanni Battista Mocchi – qui conseille aux musiciens de ne pas se laisser effrayer par l’apparente difficulté de certaines parties –, Arion Romanus (1670) offre vingt-huit motets de durée et de structure variées, qui alternent récitatifs dramatiques, airs et madrigaux, d’abord pour une voix seule (Mortalis homo), puis pour deux, et ainsi de suite jusqu’à l’intervention finale d’un quintette (O quam dilecta Mensa).
Enregistré dans différents lieux saints de Rome entre 2000 et 2013, le claveciniste et organiste Flavio Colusso conduit l’Ensemble Seicentonovecento avec une délicatesse charmante, presque pudique. Au nombre de neuf, les chanteurs ne posent pas de souci majeur, à part quelques aigus perçants, ici ou là : ils se nomment Elena Cecchi Fedi, Margherita Chiminelli, Maria Chiara Chizzoni, Arianna Miceli (soprani), Radu Marian (sopraniste), Antonio Giovannini (alto), Maurizio Dalena (ténor), Luigi De Donato et Aurio Tomicich (basses).
LB