Chroniques

par samuel moreau

Francesco Landini
pièces pour voix

1 CD Zig-Zag Territoires (2005)
ZZT 050603
Francesco Landini | pièces pour voix

Que reste-t-il de Francesco Landini (1325-1397) ? Si le nom du musicien florentin le plus connu de son temps nous est peu familier, son œuvre, en revanche, s'impose ; elle représente actuellement un quart de la musique profane de l'Ars Nova italienne – dont cent quarante ballate qui servirent à de nombreuses variations instrumentales et circulèrent au moins jusqu'au début du XVe siècle. Enfant, cet artiste cultivé et érudit perdit la vue des suites d'une variole, et devint un cappellanus de San Lorenzo célèbre pour ses dons de chanteur, d'organiste et d'instrumentiste en général – un des premiers artistes italiens à sortir de l'anonymat par le talent de sa plume. À l'exception d'un fragment de motet, il ne nous est rien resté de sa musique sacrée.

Le Trecento fut une période vivace en nouveautés culturelles, surtout avec la naissance de la polyphonie profane destinée à d'habiles musiciens professionnels – dans le sillage des troubadours français dont l'art circulait dans les cours de l'Italie du Nord depuis deux siècles. Le madrigale s'imposa d'abord, puis la caccia, et enfin la ballata, liée en premier lieu à la danse avant de devenir le summum de l'union entre texte et musique. Comme beaucoup de ses confrères, Landini abandonna vite le premier genre, jugé assez frustre (thématiques amoureuses et pastorales), pour privilégier le dernier, avec des sujets plutôt sérieux. La cinquantaine de ballate à trois voix qui nous est parvenue est un bon exemple de sa préoccupation d'une trame polyphonique, du contrepoint et du traitement des modes rythmiques français. Ce sont elles qui occupent la majorité de ce programme, soutenues par la présence discrète d'instruments – en particulier l'orgue portatif et le rebec.

Pionniers de la redécouverte d'un répertoire médiévale, l'ensemble Micrologus œuvre depuis vingt ans déjà, notamment par des recherches ethnomusicologiques qui ont permis un renouveau de l'interprétation (le phrasé, l'ornementation, l'émission vocale, etc.) et l'appropriation d'un espace sonore qui n'est plus forcément la salle de spectacle, mais l'église, la cour, la rue. Si certaines voix sont critiquables – en particulier l'instable contre-ténor de la plage 8 –, l'engagement se fait avec beaucoup de ferveur et, souvent, de recueillement.

SM