Chroniques

par irma foletti

L’Italiana in Algeri | L’Italienne à Alger
dramma giocoso de Gioachino Rossini

Rossini in Wildbad / Königliches Kurtheater, Bad Wildbad
- 26 juillet 2024
La nouvelle production de la célèbre "Italiana in Algeri" de Rossini in Wildbad
© patrick pfeiffer

L’Italiana in Algeri que propose le festival Rossini in Wildbad dans le petit Kurtheater fait participer une grande majorité de jeunes de l’Akademie BelCanto, c’est-à-dire l’académie de chant de la manifestation. Plus précisément, les sept rôles de l’opéra rossinien sont confiés à ses membres, à l’exception du Taddeo d’Emmanuel Franco, doté d’une voix ferme et d’un timbre agréable, comme un poisson dans l’eau sur scène dans ce rôle comique.

Nous retrouvons avec grand plaisir le mezzo Polina Anikina, entendu lors du concert de l’avant-veille [lire notre chronique du 24 juillet 2024], cette fois dans le rôle-titre d’Isabella. La jeune chanteuse a décidemment beaucoup d’atouts à faire valoir, d’abord un grand charme vocal, une bonne réserve de puissance, ainsi qu’un bel abattage pour ses passages rapides, en particulier au cours de la cabalette du grand air Pensa alla patria au second acte. Entendu également lors du concert, le baryton-basse Doğukan Özkan défend avec truculence le rôle de Mustafa, capable d’enfler certaines notes (Pappataci au second acte) et de passer sans souci les traits d’agilité, mais à l’aide récurrente du chef qui ralentit le tempo de manière spectaculaire.

Hyunduk Kim a le mérite de chanter le rôle de Lindoro dans un style élégant, mais il marque peu, faisant état de fragilités dans ses suraigus et les vocalises. Francesco Bossi est bien plus stable en Haly, baryton d’un joli grain qui ne fait qu’une bouchée de son unique air, Le femmine d’Italia. Le soprano Oksana Vakula (Elvira) et le mezzo Camilla Carol Farias (Zulma) complètent, la première bien sonore mais un peu pointue de timbre, tandis que la seconde possède un son plus rond.

La trentaine de musiciens de l’Orkiestra symfoniczna filharmonii im. Szymanowskiego w Krakowie (Orchestre symphonique de la Philharmonie Szymanowski de Cracovie), pour certains placés au chausse-pied dans la petite fosse du théâtre, assurent une excellente exécution, sous la baguette énergique de José Miguel Pérez-Sierra. Les choristes également, en nombre restreint sur le plateau, apportent leur juste contribution.

Avec des moyens limités, la mise en scène de Jochen Schönleber est efficace. On découvre d’abord la boutique de kebabs Döner Mustafa. Le patron se fait servir par sa femme Elvira mais, excédé, jette tout à terre. L’homme de ménage Lindoro passe plus tard, et c’est d’une voiture de course du Paris-Dakar que sort Isabella, et non du bateau naufragé du livret. Pour le reste, on demeure dans l’imagerie traditionnelle de l’œuvre, jusqu’aux esclaves dont les tenues sont aux couleurs du drapeau italien et aux pâtes à la sauce tomate ingurgitée par le nouveau Pappataci Mustafa. Une réjouissante représentation.

IF